« Culture et héritage »
On constate fréquemment la persistance de baronnies au sein des entreprises. Marketing, R&D, commerce et supply chain murés dans leurs superbes isolements et la certitude de leurs spécificités.
L’ERP a réussi à décloisonner l’entreprise, essentiellement sur le flux de données financières et un peu moins sur le flux de données produit.
Et pourtant, le flux produit n’est-il pas le flux principal de données de l’entreprise ?
Alors comment les outils de nouvelle génération pourront venir au secours du décloisonnement de l’entreprise ?
Dit autrement, comment passer de la « gestion de données » (PDM) à la « gestion du cycle de vie » (PLM) des produits ?
L’enjeu est de taille si l’on veut tirer parti des investissements conséquents d’un PLM, accélérer les cycles de mise sur le marché et réduire les non qualités.
Paysage des échanges PLM – Supply Chain
Dans les années 2000, il était de coutume de comparer les frontières entre le PLM et l’ERP, et de faire des pronostics sur quel domaine allait dévorer l’autre, ceci aiguillonné par les ambitions démesurées de certains PLM, ou par l’émergence de modules PLM des grands éditeurs ERP.
Si les modes progiciels passent, les flux évoluent moins.
Les échanges PLM – Supply Chain sont nombreux et ne se cantonnent pas à juste passer des articles validés des études vers la production. Le rôle du PLM va plus loin. Il doit également supporter les processus allant de l’amont à la conception (ventes, marketing) à l’aval (prévisions, fabrication, après-vente) et se positionner en tant qu’outil support. Toute sa richesse ne peut être déversée par interface dans l’ERP.
En suivant la chronologie du cycle de vie des produits, il est possible de distinguer les points d’échange habituels, plus ou moins maîtrisés mais que nous pouvons observer à la lumière de l’apport potentiel du PLM :
Une 1ère approche de l’apport du PLM
- L’amélioration des prévisions de besoin en composants
- Les capacités du PLM à gérer des options et variantes, des plateformes communes, des composants ou solutions techniques réutilisables, sont un atout pour améliorer l’efficacité des prévisions de vente et d’approvisionnements.
- La standardisation, la différentiation retardée
- Le PLM a son rôle à jouer dans cette stratégie en isolant précisément dans la structuration des données les constituants / attributs susceptibles de varier d’un produit à l’autre. . Une intégration dynamique avec le manufacturing permet d’appliquer cette stratégie, au contraire de l’interface » classique » qui déversera les nomenclatures en masse depuis le PLM vers le manufacturing en espérant que l’ERP s’y retrouve…
- La construction et complétude de la conformité
- Les possibilités de modélisation par le PLM du produit et de son processus de production en font un outil commun « conception – industrialisation » et un pont entre les deux mondes.
- Le PLM permet en outre d’accueillir les données d’essais, de tests, de validation des produits, et par l’adjonction de KPI et rapports, d’automatiser la préparation des acceptations clients.
- Les échanges en phase amont de conception : protos, consultations, appros anticipés
- Un dialogue structurant s’établit entre les acteurs de la définition du produit et, via les achats, les fournisseurs. Le PLM ici fait foi : il doit assurer la rigueur et la traçabilité des informations échangées. La maturité des données sont parmi les fondamentaux du PLM qui permettent de travailler avec rigueur dans ces phases amont.
- Un second aspect plus qu’utile du dialogue avec la supply chain est de permettre l’anticipation : par exemple, identifier très tôt les articles à long délai ou chers ou mono source…etc…
- Il en va de même avec les prototypes, les articles concernés impliquant une gestion très fine de leur maturité.
- Le flux de création validation de produits / composants, et les modifications, y compris modifications tardives
- Lors de la décision de lancer / d’appliquer une modification, les processus outillés par le PLM doivent rendre compte des avis de la supply chain, dans les décisions et en particulier pour les choix d’effectivité : à quel périmètre faut-il appliquer les modifications ? Eviter ainsi les dysfonctionnements-type : par exemple, on applique une modification en remplaçant un composant par un autre (moins cher). Et si l’on omet de consulter les stocks, on risque de se retrouver avec de grandes quantités de l’ancien composant, déjà commandées, et devenues obsolètes, qui iront engraisser le stock mort…
- Pour l’après-vente, un autre point de dialogue concerne l’interchangeabilité : il s’agit là de partager des critères clairs sur ce qu’est un article interchangeable avec un autre.
Les critères usuels du bureau d’étude sont : « Form, Fit, Function ». Les fonctions doivent recouvrir en théorie tous les métiers, comme la maintenance, la logistique. Enfin, deux articles interchangeables sont réputés être mélangeables en stock. Qu’en est-il alors de la traçabilité ?
- La remontée des informations de production et d’après-vente (« as built », numéros de série, « as maintained »…) est clé pour l’ensemble de l’entreprise
- Les informations sur la vie du produit dans sa Supply Chain doivent remonter vers le PLM, après production, lorsqu’il s’agit de vérifier la conformité du » bas du cycle en V » (typiquement les « as built » et « as designed »).
- Ces possibilités du PLM sont autant d’informations à partager largement : avec les études pour les retours d’expérience, avec la production pour la gestion des stocks, avec l’après-vente pour améliorer le taux de service…
Mais aussi
D’autres points d’échanges détaillés pourraient également être abordés sous l’angle de l’apport du PLM à la supply chain étendue :
- Gestion des contraintes réglementaires, liées par exemple au stockage et au transport
- Design for X (prise en compte des contraintes X = production, manufacturing, capacité…) dans la conception ;
- « build anywhere » et les notions de nomenclature industrielle centralisée (central mBOM),
- Gestion des kits et arborescences logistiques,
- Gestion des outillages, gammes, réglages, documentations de production ou maintenance comme les éclatés, etc.
- Service aux clients : communication à l’extérieur de l’entreprise des seules données pertinentes et – surtout – valides !
- …etc…
En conclusion…
La transversalité du PLM à travers la Supply Chain – et bien au-delà – est vitale.
Quand on y pense, ça tombe sous le sens : le ‘produit’ est la base de l’existence de l’entreprise !
Il est donc clé de ne plus présenter le PLM comme » l’outil de la R&D « mais comme la solution transverse qui permet à toute l’entreprise de partager les mêmes données d’un produit tout au long de sa vie.
Pour mettre en œuvre cette transversalité, le choix des priorités, l’évolution des processus impactés, la capacité des équipes à accepter ces évolutions viennent alors sur le devant de la scène (exemples que j’ai pu constater sur certaines de mes missions) mais ceci est une autre histoire…
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