Dans la lignée de l’article publié sur les Lab d’Innovation et leurs usages possibles, je souhaite proposer un focus sur le cœur d’une activité de Lab et des approches type Design Thinking, Lean Start Up, Agile : le prototypage et son résultat, le prototype.
Pour rappel, un des objectifs attendus du Lab est d’accélérer le processus de développement de produits ou services, grâce à l’appui de méthodologies de prototypage dit « rapide » et de moyens permettant la matérialisation de presque n’importe quelle idée. Belle promesse, mais c’est omettre un autre point essentiel : que cherche-t-on à démontrer, à prouver par le prototype ? Quelles sont les raisons de son émergence dans le réel ?
Un excellent article académique « What do Prototypes prototype? » (S.Hould, C.Hill, 1997 – in Handbook of Human-Computer interactions) nous offre une grille de lecture fort intéressante permettant de saisir quelles sont les finalités potentielles d’un prototype. Le focus de l’article est orienté vers le développement d’une application de modélisation d’espace 3D (type outil de conception de cuisine en 3D) et de nombreux éléments peuvent en être extraits et appliqués à tout type de prototype.
Mais qu’est-ce qu’un prototype ?
Le terme « prototype » en lui-même est ambigu. Selon qu’on est ingénieur (et même en fonction du profil d’ingénieur la perception du terme varie), designer, marketer, chercheur ou analyste, le prototype prend des formes et des sens différents. Il répond également à des attentes et besoins tout aussi variés. Par exemple, une interface mobile en mock-ups peut être un prototype, tout autant qu’un bout de code, un storyboard ou une nouvelle offre de service ciblée sur un petit groupe de clients ou d’utilisateurs. Par analogie, il est peut-être vu comme le Minimum Viable Product (MVP) dans certains cas.
Et alors ? À quoi sert vraiment le prototype ? Essentiellement à examiner des problématiques de conception (design, maquettage, etc.), de positionnement sur un marché, d’écosystème interne, de communauté, de profil de clientèle, de modèle d’organisation, de nouveaux processus et à évaluer les solutions proposées. Il est donc un objet, ou un artefact, au sens d’une production tangible, reflétant une idée et à travers laquelle un groupe va évaluer s’il remplit un rôle (son utilité), s’il donne envie d’être utilisé (le Look & Feel, ce que l’on nommerait la « Désirabilité » en Design Thinking) et s’il est « implémentable » (la « Faisabilité » en Design Thinking).
Quel objectif pour quel prototype ?
Les 3 premiers objectifs
Le schéma ci-dessus reprend les 3 piliers de la valeur délivrée par un prototype. Il définit trois types de prototypes :
- Le prototype « Rôle » : il est conçu pour répondre aux questions relatives à ce que pourrait faire l’objet ou l’artefact pour les clients/utilisateurs. Il décrit et donne vie à la/les fonctionnalités cibles. Il permet de communiquer sur l’intérêt et l’objectif de l’objet vis-à-vis du client/utilisateur, ainsi que la valeur que ce dernier peut en escompter. Il a une vocation principalement orientée vers l’interne.
- Le prototype « Look & Feel » : il est conçu pour questionner principalement l’ergonomie, la prise en main, la facilité à utiliser l’objet, le visuel et l’esthétique. Il ouvre le champ de l’expérience vécue au contact de l’objet. Il est utilisé avec les clients/utilisateurs pour améliorer l’expérience proposée.
- Le prototype « Implémentation » : ce type de prototype vise à répondre aux enjeux de faisabilité et donc les équipes travaillent à résoudre les problématiques technologiques qu’engendre le prototype. Les réponses peuvent aussi bien aboutir à la création de nouvelles solutions techniques, qu’à l’adaptation d’un système existant. Il est aussi un appui pour améliorer les performances attendues coté client/utilisateur.
Bonus : le prototype de « synthèse »
Cependant, il existe un quatrième type de prototype : le prototype « d’intégration », que je nommerai le prototype « synthèse ». La figure ci-dessus le positionne dans notre triangle.
Son rôle est clair : il est une vision du prototype dans sa globalité. Il est la synthèse des 3 pôles, ou du moins il tente d’explorer conjointement les 3 axes. Il permet de vérifier que le prototype répond à un usage attendu – rôle -, que l’expérience à son contact est positive et bien perçue – look & feel – et qu’il satisfait tant au niveau des performances qu’au niveau des contraintes existantes – implémentation.
Quels enjeux pour vous (et moi) ?
Avant tout le prototype est porteur de sens et facilitateur d’échange, il cristallise la convergence et la divergence. Il a le mérite de donner corps aux attentes des parties prenantes. L’approche présentée offre la possibilité de mener différentes expérimentations autour d’un projet – dont le prototype est une étape –, de façon simultanée ou consécutive.
Par conséquent, plus vous présenterez de prototypes – à différents stades d’avancement (dessins, maquette, V0, V1…) – plus vous aurez la capacité à ajuster le tir et à faire évoluer l’idée. C’est le sacro-saint « Fail Fast, Fail Often… », que l’on pourrait reformuler en « Fail Fast, Learn More and More Often ». Il faut donc penser l’entreprise sous l’angle de l’organisation apprenante et le prototype comme le catalyseur de cet apprentissage.
Par conséquent, une précaution s’impose : bien expliquer l’objectif de ce prototype : est-il pour valider qu’il y a un besoin et un usage (rôle) ? Est-ce que les personnes ont envie de l’utiliser et qu’il est utilisable (Look & Feel) ? Ou encore est-ce pour vérifier qu’il est faisable (Implémentation) ? Ou alors est-ce une synthèse des 3 pointes du triangle ? En effet, rien de pire pour un utilisateur que de se retrouver avec un objet imparfait et en construction, alors qu’il est habitué à tester des produits plus finis et aboutis. Une façon de présenter pourrait être : « ce modèle est un prototype qui a pour vocation de tester… et nous sommes tous disposés à prendre vos remarques sur d’autres aspects tels que… Cependant, ici nous voulons valider… et par définition cet objet est en construction, imparfait et nécessite vos retours pour se perfectionner ».
Nous avons tous des exemples de situations où une idée imparfaite, ou mal contextualisée, s’est vue rejetée faute d’une préparation suffisante de l’auditoire. En bref, ici nous travaillons sur la forme, le fond et leur articulation.
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